Alors que bon nombre d'entre nous tiennent pour acquis un accès pratique et fiable à Internet, il existe de grandes inégalités dans cet accès, en fonction de facteurs socio-économiques et géographiques. Pouvoir se connecter et le « droit à l'accès » sont de grandes questions et le sujet de nombreux débats. Récemment, certains gouvernements ont pris position pour soutenir l'accès à Internet comme un principe de base pour leurs citoyens, que ce soit de façon implicite ou explicitement écrit dans la loi. En 2009 par exemple, la Finlande a adopté une loi garantissant à chaque personne dans le pays un accès à un mégabit. En outre, l'Union Européenne reconnaît le droit à la liberté d'expression et d'information, souvent interprété comme couvrant l'accès à Internet.
Aux USA, Jeff Jarvis dans sa Déclaration des Droits pour le Cyberespace soutient que « nous reconnaissons des limitations à la liberté d'expression, mais elles doivent être définies de façon aussi restrictive que possible, sinon nous risquons de nous retrouver dans une situation où la moindre offense sera prétexte à limitation. La liberté est notre situation par défaut ».1
À l'inverse, de nombreux gouvernements, comme en France, menacent ce choix par des lois comme HADOPI, qui dans sa première version autorisait une restriction de l'utilisation d'Internet sur une simple accusation de violation du droit d'auteur. Sans contrôle de la justice, le gouvernement aurait pu supprimer la capacité d'un citoyen à entrer dans la sphère publique du Web. C'est alors lui interdire d'effectuer des activités cruciales telles que voter, payer ses impôts et plus généralement s'engager en politique.
Même si ce sont des sujets très intéressants et qu'il y a de nombreux côtés intéressants au débat concernant le « droit d'accès », nous voyons cela comme le sujet d'un autre livre. Nous pensons que le Web a une utilité positive et nous espérons que le plus grand nombre possible de gens pourront y accéder s'ils le souhaitent, mais nous voulons restreindre notre réflexion à ce qui se passe « dans » cet espace en ligne.
Sur le Web, nous avons toute une gamme d'activités ; parfois, nos actions sont très simples et grand public, comme consulter une page web ou répéter un message. D'autres actions supposent un engagement plus important et davantage de connaissances. Cet éventail de possibilités est sous votre contrôle, nous pensons que les informations personnelles que vous communiquez sont les vôtres et que vous devez choisir leur destinée. Dans cette section, nous allons évoquer la vie privée, l'anonymat et la portabilité des données, c'est-à-dire des aspects importants pour que vous gardiez le contrôle de vos informations et de votre participation.
Commençons avec un exemple. Il y a une discordance entre la fonctionnalité générale « partager » des réseaux sociaux et les paramètres de vie privée de ces réseaux. Si vous réglez vos paramètres de vie privée pour permettre aux amis de vos amis de voir vos informations, cela signifie que vos amis décident avec vous de qui va avoir accès à vos informations. Ou, si vous partagez un lien sur le profil d'un ami, cet ami va décider avec vous qui va voir ces informations. Cela signifie que partager dans des réseaux sociaux est une activité collaborative. Cependant, régler vos « préférences » de vie privée est une action individuelle.
La politique de vie privée de Facebook, l'un des plus grands réseaux sociaux actuel, peut se résumer ainsi : nous voulons que vous ayez le contrôle sur vos informations. Cependant, pour gérer votre vie privée sur Facebook, vous allez devoir naviguer entre 50 réglages et plus de 170 options pour les adapter à vos souhaits.
Facebook nous indique que nous possédons, contrôlons et protégeons individuellement nos données sur un espace de partage collaboratif. D'un autre côté, Facebook collecte toutes sortes d'informations à propos de vous sur d'autres sites et applications. Ils partagent également ces données avec des tiers. Et, bien sûr, ils ne vous laisseront pas contrôler cela. C'est exactement ce type de contradictions auxquelles il faudra se confronter lors de la construction du Web du futur.
La bataille ne s'arrête pas simplement au partage de photographies ou de votre situation sur les réseaux sociaux. Beaucoup d'internautes s'inquiètent vraiment de la protection de leur identité. Il est relativement facile de mettre en place des moyens techniques pour éviter d'être identifié, quelle qu'en soit votre raison. Vous devriez avoir le choix d'utiliser le Web anonymement et d'être conscient de l'utilisation que font les services de vos données. Vous avez également le choix de ne pas participer.
Enfin, la portabilité des données est un point important puisqu'elle vous permet d'exercer un contrôle essentiel. Vous devriez avoir la possibilité de faire une sauvegarde de vos données et de les partager avec d'autres utilisateurs, logiciels ou services en ligne2. Ce sont vos données après tout. Un service en ligne devrait donner aux utilisateurs la possibilité de faire migrer leurs données dans un format aussi ouvert et compatible que possible vers d'autres logiciels et services.
En considérant l'avenir des de la vie privée, de l'anonymat et de la portabilité en ligne des données, Evan Prodromou s'interroge : « Pouvons-nous faire en sorte que travailler avec des services en réseau s'apparente davantage à une visite chez un ami qu'à un séjour en prison ? L'avenir nous dira si nous pouvons bâtir une culture autour des services de réseaux libres qui soient respectueux de l'autonomie des utilisateurs, pour que nous puissions utiliser d'autres ordinateurs avec une relative confiance ».
Nous sommes aussi convaincus que vous devriez pouvoir abandonner totalement un service en ligne n'importe quand. Beaucoup de ces services rendent bien difficile la suppression de votre compte, tandis que d'autres ne vous permettent même pas de les quitter. La possibilité d'abandonner est une fonction capitale pour les réseaux sociaux sur le Web ouvert, et pas seulement une faveur qu'on vous accorde, et ce pour des raisons très concrètes. Par exemple, on comprend aisément pourquoi chacun devrait pouvoir supprimer son compte facilement si l'on estime que pour une raison, ou pour une autre, des informations privées sont mises en danger. Toutefois, beaucoup de réseaux sociaux ne vous donnent pas facilement la possibilité de vous désinscrire. En fait, leur modèle économique repose sur l'accumulation des comptes et des données de l'utilisateur.
Dans le menu Système de Facebook, vous pouvez désactiver votre compte, mais pas le supprimer. La suppression est possible, mais pas évidente à faire. Si vous parvenez à désactiver votre compte Facebook, toutes vos informations seront conservées sur les serveurs de l'entreprise. Facebook présente cela comme une opportunité pour vous, au cas où vous décideriez de ré-activer votre compte. Pour ré-activer votre compte, vous n'avez qu'à vous reconnecter, et tout sera dans l'état où vous l'aviez laissé.
La bonne nouvelle est que vous pouvez quand même supprimer votre compte. Mais trouver comment le faire n'est pas facile. Aussi, comme de plus en plus de services utilisent Facebook Connect pour authentifier les utilisateurs, vous deviendrez dépendant de ce système fermé, et le quitter n'en sera que plus difficile.
L'incapacité de supprimer facilement un compte a contraint certains à employer des stratégies de sortie inhabituelles, plutôt acrobatiques, mais avec des conséquences dans le monde réel3. Néanmoins, nous ne devrions pas avoir à aller aussi loin en nous suicidant virtuellement. Partir devrait être facile, à portée de main, et vous devriez être capable de décider ce que vous prenez avec vous, ainsi que ce que vous laissez derrière vous.
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